jeudi 4 septembre 2008

Épisode 10 Évènement historique, blessures véridiques

Cette semaine, j’ai promis à Elaine de répondre à la question « peux-tu bien me dire ce que tu manges? » et à Laurise de parler de perspective d’emploi chez les jeunes inuit… Je vais traiter de ces sujets très importants… une autre fois! Pour l’instant, l’actualité de la communauté et mon intérêt personnel dans l’observation des faits sociaux m’obligent à vous conter ce dont j’ai été témoin cette semaine.

Il faut savoir que je suis trop jeune pour avoir connu les grands chantiers de construction, les projets de développement qui ont transformé le paysage montréalais. L’autoroute 40, Place-Ville Marie, Terre des Hommes, les installations olympiques… J’adore en entendre parler, mais je n’en ai jamais senti l’excitation, l’attrait de la nouveauté, l’énervement de la première visite! Puis, tranquillement, le passage à la normalité : les structures gigantesques deviennent tout à fait banales dans le décor, comme si elles avaient toujours été là. J’ai toujours été fascinée par cette expérience architecturale que je n’ai jamais vraiment vécue.

Et bien, j’ai eu ce privilège à Quaqtaq cette semaine : on a asphalté une rue! Chers lecteurs, j’ai vécu une expérience digne de l’érection de la tour du stade, j’en suis certaine!

Quand je suis arrivée dans cette communauté, les quelques routes n’étaient que de gravelle. Le parc automobile compte, approximativement, pour les 300 résidents, une cinquantaine de pick-up et autres camions de service, beaucoup plus encore de « 4-roues-tous-terrains-machin » (qu’on appelle ici simplement des Honda) et tout plein de scooters conduits par les ados. Les routes de gravelles semblaient permettre à ces beaux bolides là de circuler dans les rues de la communauté. Bon, pas tout à fait moderne la gravelle, c’est vrai, mais je ne me suis pas arrêtée à l’étude de la chaussée; il y avait tellement d’autres détails qui me semblaient si particuliers au Nord (je vais, éventuellement, vous parler de ma toilette dans une prochaine chronique!).

Par contre, dès mes premiers jours ici, j’ai bien vu qu’on tapait la voie, qu’on la recouvrait de camions pleins de petites roches venues de l’autre bout du village et, un beau matin, la machine à asphalter la rue s’est mise à cracher son goudron noir. La fête dans l’école : impossible de retenir les jeunes à la récréation. Je n’avais jamais vu un chantier d'aussi bonne d’humeur, si loin des normes de la CSST sans pourtant qu’un seul incident soit signalé! Pendant les périodes de l’après-midi, le taux d’absentéisme était inquiétant chez les élèves du secondaire. Toute la journée, ça a été la fête dans la rue!

Toute la nuit aussi; les enfants ont paradé avec leurs rollers blades (qu’ils utilisaient jusqu’alors lors de leurs voyages « au Sud »), leurs vélos, leurs trottinettes, leurs souliers de courses à roulettes et tout plein de bâtons fluorescents lumineux. Cette ribambelle roulante était entrecoupée de scooters et de Hondas, décorés de lumières de Noël et de toutes sortes de guirlandes. Cette parade a duré longtemps! Des « vroum vroum » de moteurs jusqu’au petit matin. Je le sais, tout ce beau monde-là faisait demi-tour devant ma maison…

J’habite la maison verte à côté de la piscine. Maintenant, je dois plutôt la décrire comme étant la maison où l’asphalte se termine! Après 400m. de pavé (j’ai « photoshopé » le tronçon asphalté sur l'image Google Maps), le chantier s’est arrêté devant ma maison. Je ne sais pas trop pourquoi. Je suis une blogueuse, pas une journaliste d’enquête quand même!! Manque de matériel? Problème de machinerie? Chose certaine, sur les 4km de routes asphaltées dont on m’a parlé, il n’y en a à peine 10% complété. Si c’est pour être terminé cette année, il faut faire vite : dans un mois, un mois et demi au maximum, la route, asphaltée ou pas, sera recouverte de neige.

Mais déjà, la fête s’est calmée; c’est devenu tout à fait normal que la rue soit asphaltée. Mes élèves, à qui j’ai posé la question mercredi après-midi, m’ont même dit que ce n’était pas une bonne idée, l’asphalte à Quaqtaq : quand il y a des accidents, ça fait plus mal qu’avant! Et une de mes ados de me montrer les monstrueuses éraflures qu’elle a sur chacun de ses genoux… 2 accidents différents…

Pour l’instant, l’excitation asphaltée est retombée. Reste à voir si la fête reprendra à la poursuite du chantier : )

Salutations de ma « salle de rédaction », ma chambre confortable, que j’aime beaucoup!

À la semaine prochaine.

5 commentaires:

Elias a dit...

Je félicite de tout coeur les habitants de Quaqtaq pour leur nouvelle route asphaltée. Je félicite aussi la journaliste qui nous a fait part de l'évènement sans délai.
Dans ma jeunesse j'avais un rendez-vous hebdomadaire, celui de la parution du journal Tintin, maintenant j'ai un rendez vous chaque vendredi celui de la parution du Canard enchaîné, et tout récemment j'ai ajouté le rendez-vous du jeudi, jour de parution du Blog de la nouvelle journaliste libre de toutes attaches politiques.

Anonyme a dit...

Ha! Tu m'as fait bien rire! Une rue asphaltée vaut bien l'expo 67!

Tu vas me trouver fatiguant avec mon Richard Desjardins, mais dans un spectacle, il dit qu'Abitibi veut dire "Là où l'asphalte arrête". Alors tu es un peu en Abitibi aussi!

Anonyme a dit...

À chaque semaine j'écoute attentivement mes téléromans préférés mais le jeudi avec empressement je regarde et lis mon ORDIROMAN de Marie Aboumrad.

dimitridf a dit...

Félicitations à Quataq pour sa route et à Marie pour son halte routière et sa belle table Ikea.

VeR a dit...

Tu sais que tu as un petit look inuit sur ta photo?
Tu te m^ele bien a la communaute ou les gens de l'exterieur reste un peu a l'ecart?

(phil et ver, de barcelona!.. desole pour les accents, clavier espagnol sur ordi allemand..!!!)