jeudi 19 mars 2009

Épisode 36 De la neige et du cash

Dans l’imaginaire de plusieurs, le Nord c’est l’Eldorado, un lieu où on peut aller travailler et revenir chez soi avec une fortune, devenir riche en moins de temps qu’il faut pour dire
« blizzard ».

Oui, les salaires nordiques sont intéressants… mais c’est à prendre avec des pincettes! Ça dépend beaucoup du corps de métiers auquel on appartient. Un ingénieur, dans une mine de tous les dangers, aux quarts de travail impossibles, est très grassement payé (quoique rapidement épuisé!). Les travailleurs du milieu de la santé, avec beaucoup de responsabilités, ont de très bonnes rémunérations, d’autant plus que ses déplacements d’un village à l’autre sont fréquents (ce qui n’est pas toujours jojo).

Les enseignants? Les enseignants ne sont pas à plaindre, mais ce qui est déposé dans nos comptes en banque, de deux semaines en deux semaines, ça n’a rien à voir avec le gros lot du 6/49.

Il faut savoir que les profs du Nord sont payés selon la même échelle salariale que tous les autres enseignants des écoles publiques. Après tout, on fait le même boulot, avec des enfants semblables, dans des écoles modernes, aux heures scolaires habituelles. Mais, parce qu’on est loin, en guise de rémunération spéciale du Nord, on reçoit aussi deux primes. La première sert à motiver les candidats à déménager au Nord de la ligne des arbres, malgré l’éloignement et le climat rebutant. Cette allocation augmente en fonction de l’isolement de la communauté. L’autre prime, un peu plus grosse à chaque année scolaire terminée, c’est pour faire en sorte qu’on reste le plus longtemps possible! À travailler à Quaqtaq présentement, je touche donc mon salaire habituel d’enseignante avec quelques milliers de $ de plus. Pas assez pour dire Bye bye Boss, mais assez pour savoir que je vais revenir au Sud à la fin de l’année riche. Pleine aux as!

C’est pas tant le salaire net qui fait une différence; c’est que je ne dépense pas un rond! Niet, rien, simplicité (et même pas volontaire). Faut dire que je suis arrivée bien préparée avec tout ce dont j’avais besoin pour passer l’année. Mais, pas de magasins : pas de tentations! Pas de restos : pas de pourboires. Un milieu de travail pas pincé : une paire de jeans minimalement propre fait l’affaire (quoi que ceux qui me connaissent savent que je m’efforce de porter jupe et talons une fois par semaine, même en pleine tempête!).

Même pas la possibilité d’acheter un journal dans le village.

Et je ne suis pas tentée de magasiner sur Internet (sauf une fois, fer à cheveux, pendant une nuit d’insomnie… moment de faiblesse)!!

C’est de là qu’elle vient, ma richesse nordique.

Mais la question, c’est qu’une fois accumulée, la richesse, va-t-elle m'être aquise? Je pense bien que oui : j’ai maintenant un bon coussin et un projet éventuel d’achat d’un hot duplexe urbain, en copropriété avec Elaine.

Et la sagesse, elle? La sagesse va-t-elle me rester? La simplicité, celle qui est volontaire, l’épuration des besoins, réflexion sur la fugacité des biens consommables… ? Hum… Au départ, je n’ai jamais été la reine de la bébelle, mais serais-je capable d’être à Montréal stoïque devant les étalages? Devant les piles de journaux?? Honnêtement, je ne pense pas être capable de passer des semaines sans même toucher à de la monnaie comme ici!

J’ai déjà hâte à Pâques, durant notre semaine de rêlâche au "Sud", pour me faire dorloter chez Valeh, la plus chouette esthéticienne du Plateau. Et puis par Marc, le dieu des cheveux, rue St-Laurent. Ça va me prendre du nouveau linge, profiter de tous les cinémas dont je me suis privée et m’autoriser à sauter dans un taxi à la moindre goûte de pluie.

Ah, et perdre au poker contre les amis!!

Pour l’instant, dans ma toundra, toute simpliste et zen, je suis en train de lire simultanément No Logo (La tyrannie des marques, le livre culte de l’altermondialisation) et l’Accro du Shopping. En moi vivent présentement, simultanément, la hyppie et l’Accro, sans aucun paradoxe. Faut pas trop chercher à comprendre!

8 commentaires:

Elias a dit...

On ne doit pas être loin de la création d'une prime qui récompense la personne qui le mieux dans l'année a su promouvoir la vie et le travail dans le Grand Nord. Je propose ta candiature aussitôt que le prix est annoncé.

Unknown a dit...

C'est super Marie. Tu as fait une analyse économique complète, réaliste et drôle de ton année nordique.

Ça me rappelle une infirmière qui était 'montée dans le nord' principalement pour revenir chez-elle avec de l'argent.Elle y est restée trois mois!

À bientôt. Maman XXX
Maman.

Elaine B. a dit...

Chère Marie,

J'ai rendez vous avec Valeh pour un massage, demain, à 14h30. Je vais penser fort à toi pendant la première minute, promis!!

:)
Elaine

Anonyme a dit...

"No Lolo"... ça c'est vraiment un super lapsus! J'adore!

Marie a dit...

Hahaha, j'ai corrigé la coquille en espérant que personne ne la remarque Philippe... Trop tard! :)

Anonyme a dit...

Je suis curieux: combien ça a coûté en frais de transport faire venir le séchoir par internet?

Catherine et Marie Aboumrad a dit...

Hahaha! LA question Louis!
La fiche signalétique sur eBay disait bien "18$ anywhere in Canada"!
Et Quaqtaq, c'est loin, mais ça répond à la définition du "anywhere in Canada"!
Salutations :)
Marie

Catherine a dit...

Chère sœur,
tu peux avoir honte de ton moment de faiblesse, mais il te rend si sympathique!