Avec les semaines et les mois, malgré toutes les fois où je me fais traiter de « lukuapik » (c'est-à-dire « exigeante » en inuktitut) ou de « Marie Aboum-plate » (de tous les surnoms qu’on m’a donnés comme enseignante, c’est la première fois que je l’entends celui-là!), ils me demandent encore si je reste à Noël. « Ta famille, tes amis, ils peuvent venir à Quaqtaq, ils vont faire la fête aussi! Le plancher du gymnase de l’école tremble tellement on danse, c’est le fun!». Bon, je ne trouve pas que de faire vibrer le plancher du gymnase à trop danser soit une activité des plus sécuritaires… mais c’est très généreux de leur part de nous inviter tous ainsi! En fait, Noël ici, ça semble être la véritable célébration de la générosité.
J’ai demandé à mes élèves ce qu’ils voulaient pour Noël. J’ai obtenu très peu de réponses. Un peu comme si le concept de demander des bébelles n’était pas leur priorité. Ils recevront tous assurément des cadeaux, des bidules électroniques, des surprises. Ils se verront offrir aussi beaucoup de linge, peut-être un nouveau parka, une nassak (la tuque inuit crochetée), des mitaines cousues dans les dernières semaines. La fin de l’automne, c’est la saison de la couture pour les femmes inuit.
À 10 jours de la fin de l’école, ça commence à sentir la fin, leur élan de Noël est bien entamé.
Pour moi, par contre, je n’ai pas senti grand-chose dans les derniers jours.
C’est physique. Je ne me sens pas à Noël.
Je suis débarquée à Quaqtaq en plein milieu du mois d’août, il faisait 10oC : je me sentais en plein automne.
Le 17 septembre, on a eu notre première neige, c’est à ce moment que j’aurais décoré mon sapin! Mais il était un peu trop tôt et le sapin le plus proche, plutôt loin…
Maintenant, on est dans le froid et ça sent sec, ça sent mon février. Je suis déphasée avec la nature locale. En fait, pas juste avec la nature…
Il n’y a pas de centre d’achat, pas de musique d’ascenseur thématique (en fait, y’a pas d’ascenseur!), pas de poinsettias, pas de père Noël chez Jean-Coutu, pas de discussion à savoir si Noël c’est pas trop commercial. Il me manque à peu près tous mes repères culturels.
C’est beau, l’hiver nordique. Je vais bien! Mais j’ai pas un « feeling » de Noël.
Quoi que… on cogne à la porte…
« You want to buy carving? ». Non… pas cette sculpture-là… mais je pense à une autre que j’ai vue… peut-être que ça n’a pas encore été vendu?
Et c’est tout ce qu’il me fallait de commercial pour me faire plonger dans la folie du magasinage de Noël! Je veux offrir une petite pensée à ma sœur, une surprise pour un ami… Au beau milieu de la nature des plus aride, la plus calme et la plus sereine, j’ai découvert un nouveau mode de magasinage de Noël : le magasinage à l’envers.
« Oui, allo!! Sammy, Les boucles d’oreilles que tu es venu me montrer l’autre jour, est-ce que tu les as vendues? Non? Je veux te les acheter! »
Et voilà, petit à petit, j’achète des cadeaux, une nouvelle tuque, et puis l’euphorie me gagne. Et c’est très efficace, le magasinage à l’envers, pour des petits items en tout cas! Pour les plus gros, si j’avais voulu un parka par exemple, il aurait fallu que je m’y prenne d’avance, toutes les mamans n’en n’ont que pour les cadeaux de leurs propres enfants présentement. À l’heure où on se parle, ça coud! Et ça sculpte! Un véritable atelier, le village!
D’ailleurs, je suis pas mal convaincue : ça doit être comme ça qu’il fonctionne, le père Noël. Il doit appeler les artisans du coin et leur acheter des petits objets qui font plaisir!
Parce que tout le monde le sait : le père Noël habite très très proche de Quataq!
3 commentaires:
J'ai déjà traité un épisode précédent de super, je dois donc en remettre. Celui-ci est super super. Quaqtaq dans tes mots a toutes les perfections d'un monde imaginaire et tu fournies les photos pour prouver qu'elle existe pour vrai. Placer tant de scènes et de sentiments en si peu de mots c'est, en voulant te vanter, de la grande littérature.
Bonjour,
Je suis une étudiante française en immigration au Canada. J'ai moi aussi passé mon été dans le nord, à Kangiqsualujjuaq, en face de chez vous donc!
Je tiens également un blog afin que les enfants du village français dont je suis originaire me suivent. Leur institutrice étant ma maman, il est donc plus facile pour moi d'avoir des échanges avec eux.
Mon blog et ma correspondance avec les élèves vient d'être citées en exemple par L,inspection académique de Savoie (mon village étant en Savoie). L'école a donc reçu des financements pour s'équiper en ordinateur plus puissants. De ce fait, la classe est maintenant à la recherche d'une classe Canadienne afin d'échanger avec des étrangers. Ayant passé mon été au Nunavik, j'ai fait la connaissance du peuple extraordinaire qu'est le peuple Inuit. J'essaye donc depuis cet été de mettre en relations mon village et un village Inuit. C'est en faisant des recherches que je suis tombée par hasard sur votre blog. êtes-vous intéressé par cet échange (e-mail et éventuellement vidéo-conférence)?
Mon blog: www.celinebeaucamp.blogspot.com
Mon mail:
beaucamp.celine@gmail.com
En vous remerciant, je vous souhaite de bonnes fêtes de fin d'année.
Allo Marie
Pour commencer... Bravo pour ton blog!!! Je trouve ta façon d'écrire très instructive... J'aime bien prendre de tes nouvelles via ce blog. Secondo, l'esprit de fêtes, c'est dans notre âme... Il nous rattrape tôt ou tard même si on trouve ça trop commercial ou pas même si on est loin ou pas. Plus le 24 approche, plus on veut chanter "Petit papa Noël apporte nous des bébelles". Je voulais dire que j'ai adoré lire ton "épisode 24"
Passe un beau temps des fêtes !
Au plaisir de se revoir
Sylvain à MP ;)
Publier un commentaire