jeudi 10 juillet 2008

Épisode 2 Le Pourquoi

La toundra et la culture électronique : même combat

Je pars dans le Nord, entre autres, pour répondre à l’appel de la nature. Oui, moi la biologiste-sociologue-enseignante assurément intellectuelle, qui vit dans la noirceur des cinémas répertoires, à l’aise entourée de béton armé et qui aime marcher en pleine ville, en pleine foule, j’ai une violente envie de me retrouver dans la Nature. Mais attention : pas n’importe laquelle. Je ne veux pas gambader avec des tresses de chaque côté de la tête, un tablier blanc sur une robe bleue, à la recherche de la petite maison dans la prairie. Je ne veux pas partir en Asie Mineure, m’entourer de jardin zen et de nénuphars géants, impressionnistes. Je veux de l’extrême, je veux de la roche, du froid. Je veux que la survie soit un combat : comme dans un rave.

Petite pause
Bon là, Maman, faut que je t’explique. Un rave, c’est un évènement de musique électronique qui rassemble une foule de personnes qui dansent très serrés au son de la musique générée par un artiste et son ordinateur. Entièrement synthétiques comme sons, on retient que la caractéristique principale est le rythme, incessant, intense, rapide, euphorisant. Après un certain temps, même sans alcool ni drogue, on a la tête qui tourne, un étourdissement profond. On est envahi par une sensation de force, de goût de bouger, de danser avec les milliers d’autres qui nous entourent, mais aussi, paradoxalement, une sensation de faiblesse, le sentiment d’être minuscule et assez facilement écrasable dans cette masse de monde et ce bruit aux limites de l’agression. J’adore! Un extrait musical:

Fin de l’interlude culturel.

Dans la toundra, c’est exactement la même chose. Je sais; j’y suis allée, à Kangirsuk en 1996. Avec la végétation à peine plus haute que le gazon sur un vert de golf bien entretenu, à peine es-tu sorti du village que tu es la chose la plus grande qui existe. En quelques minutes de marche, tu peux perdre le Nord, au sens propre comme au figuré! La tête t’enfle à penser que tu es un géant, tu veux courir, bouger, découvrir et, aussitôt cette réflexion en branle, tu es étourdi par ta propre fragilité, par l’insignifiance que tu représentes face aux vents, aux ours, aux nuages de maringouins, aux roches. Il faut avancer, marcher, ne pas s'arrêter ou c’est la fin. Il serait si facile de s’écraser, de se perdre. Assez intense, la vie d’Inuit! Le peuple du Nord a su cultiver à la fois cette force et cette modestie de la condition humaine pour s’épanouir dans cette nature où ne survit qu'un équilibre très particulier.

Et ça, ce n’est que mon expérience en été. Il paraît qu’en hiver, par une nuit sans vent, le silence est tel que tu peux entendre le rythme régulier, constant, mécanique, débilitant de tes propres battements cardiaques. On en aurait la tête qui tourne. Enivrant. Comme dans un rave quoi! Mais un rave où la solitude remplace la foule.

J’espère bien les entendre, mes percussions cardiaques… Sinon… dans le froid, dans la nuit, dans la toundra, je mettrai mon iPod dans le tapis pour joindre les deux mondes de l’étourdissement.

C’est mon petit côté chaman technologique!

1 commentaire:

Elias a dit...

Bon voyage. Je ne pensais pas qu'il y avait tant de philosophie de rattachée à cette aventure. C'est un astronome amateur canadien qui avait découvert, il y a de cela plusieurs années, la super nova la plus proche de la terre. Il passait ses nuits à contempler le ciel et il disait que ça lui donne un sentiment de modestie. La super nova la plus proche de la terre qu'il a été le premier à découvrir est à 150 millions d'années lumière.